• Aventures confituresques en Israël...

     

    Mail du 27 janvier 2012 à des amis…

     

    Chers tous, 

     

    Je suis très heureux aujourd'hui, j'ai un immense espoir. 

     

    J'ai donné l'autre jour un pot de mes confitures à un de mes camarades de l'oulpan.  

      

    Son épouse m'a contacté, car elle veut s'impliquer dans l'affaire, ayant trouvé le produit absolument exceptionnel ("J'ai jamais mangé un truc pareil", dit-elle, en ajoutant qu'elle ne mange jamais de confiture car elle n'aime pas du tout, mais que celle-ci, c'est pas du tout la même chose…). 

      

    Je l'ai donc rencontrée. 

      

    Elle est bilingue hébreu et français (hébreu langue maternelle, c'est une sabra) et a l'expérience de la vente et négociations commerciales. 

      

    Mes produits sont excellents, certains d'entre vous le savent pour les avoir goûtés. Mais que faire quand on n'a pas une bonne connaissance de la langue, qu'on ignore tout de la législation du pays et des mœurs commerciales, qu'on ne sait pas chercher les fournisseurs ni les clients potentiels sur Internet ? 

      

    - On garde ses pots de confiture chez soi. Et l'on enrage, car on sait très bien qu'il y a un marché, peut-être même plus facile à prospecter qu'en France : il y a ici des niches de francophones très aisés qui ne trouvent pas ici les bons produits qu'ils avaient en France et les regrettent. 

    Et parmi eux, le bouche à oreille fonctionne puissance 10, pour plusieurs raisons : ils forment une communauté, se connaissent, ont des activités à travers leurs cercles. D'autre part, beaucoup d'entre eux sont enclins à donner un coup de pousse à quelqu'un qui est des leurs : 

    - En tant que nouvel arrivant : ils l'ont été; 

    - En tant que venant de France et ayant la culture française; 

    - En tant que juif; 

    - En tant qu'israélien.   

      

    S. (c'est son prénom) est née en Israël, elle en connait tous les codes ; elle est mariée à un français, et parle français parfaitement avec à peine un petit accent : je n'aurai aucune difficulté de compréhension avec elle. 

    Elle a actuellement un poste commercial dans une société de verrerie de luxe, elle connait donc une clientèle de niveau aisé. 

      

    Elle est exactement la personne qui me manquait. 

      

    Brainstorming à ce sujet le 12/2. Je vous tiendrai au courant. 

      

    Shabbat shalom ! 
     

    https://mail.google.com/mail/images/cleardot.gif 

    Mardi 31 janvier 2012

    Dimanche, c'était l'anniversaire de notre "mora[1]".

    Tout le monde apprécie Rina énormément, c'est une dame d'un grand cœur qui s'implique totalement pour nous apprendre la langue, mais aussi pour nous transmettre tout ce qu'elle peut sur Israël. Et elle est une pédagogue excellente, ce qui ne gâche rien.

    Les "russes[2]" se sont surpassés pour un très beau cadeau.

    Les "français[3]" ont organisé un petit déjeuner convivial à partager durant la pause, entre 10 et 10:30. Café, thé, boissons soft – pas de vin du Golan – croissants et gateaux.

    L'on m'avait dit d'apporter de mes confitures, que ce serait une bonne occasion de les faire connaître. Framboise, cerise au gingembre et rubharbe à la canelle…

    Discrets, mes camarades les ont goûtées sans vider les pots, de telle sorte que j'ai pû les offrir presque pleins à notre professeur.

    Elle pensait en avoir "pour l'année".

    Mais ce matin, elle m'a dit que les pots étaient finis. "Je n'ai jamais mangé une telle confiture", me dit-elle…

     

    Dimanche 5 février 2012

    Ce matin, alors que je sortais de la salle de classe pour la pause de 10 heures, Rina m'arrête: "Yaakov, je voudrais te passer commande d'un pot de confiture d'orange…"

    Mais le meilleur est à venir.

    Alors que je me dirige à travers le parc vers l'arrêt de bus, avec mes camarades "français", j'entends Rina qui me rappelle.

    Nous nous arrêtons pour lui permettre de nous rejoindre…

    "Yaakov, j'ai eu une idée. Les mardi et jeudi, il y a l'oulpan des retraités. Tu pourrais installer une table dans la cour et proposer aux gens de goûter tes confitures. Je suis sure que tu aurais des clients, car on n'en trouve pas des comme ça en Israël…."

    Elle est très enthousiaste, et si je l'écoutais, je viendrais dès après-demain avec quelques pots pour faire goûter.

    Je lui dis que l'idée est excellente, mais que je dois d'abord refaire mon stock, car j'ai déjà une séance de dégustation le 8 auprès d'une association d'israéliens francophones, qui va sans doute épuiser mes réserves, et qu'il n'est pas bon de faire attendre les clients après une prise de commande.

    Nous continuons à deviser jusque l'arrêt du bus, Rina me fait l'article sur mes confitures, soulignant qu'elles ne sont pas trop sucrées et qu'on sent bien qu'elles ne contiennent aucun produit chimique…

    Elle va demander à la directrice du centre "beit Vosk" une autorisation, pour moi, de mettre une table de dégustation quand je le voudrai. Mine d'or…

    Dans le bus, je gamberge…

    Mon problème est désormais très simple, trouver de la verrerie. Car avec l'association francophone où je vais le 8 et la possibilité de faire goûter à l'oulpan, c'est entre 100 et 300 pots qui vont partir. Tout de suite.

    Je préférerais 300 pour faire rentrer des sous, je préférerais 100 pour la progression de la montée en charge…

    Arrivé près de chez moi, je vais parler avec mon vendeur de fruits et légumes. Il me connait bien, c'est chez lui que je vais régulièrement acheter 3 ou 4 tomates, 2 ou trois concombres, 1 ou deux piments, parfois quelques pommes de terre et des oignons. Une tête d'ail, aussi, de temps à autre. Autant dire que je suis un très petit client, mais régulier.

    A sa machoire supérieure lui restent deux dents, je n'ai pas compté celles de l'inférieure.

    Je constate avec plaisir qu'il est seul à cette heure…

    "Bonjour, j'ai une question à te poser, mais je parle encore mal hébreu…

    - Doucement, doucement, me répond-il.

    - Voilà: je fais des confitures, et on me commande de l'orange; Est-ce que tu en vends "auxquelles on n'a rien mis après qu'on les ai prises de l'arbre. Tu sais, quelque chose pour qu'elles durent plus longtemps…"

    Résultat: oui, il a des oranges et pamplemousses sans traitement après récolte. Il me fera un bon prix.

    Je l'ai prévenu: au début, par 10 kilos. Mais dans 2 ou 3 mois, peut-être par 100 kilos/mois.

    On part sur 5 shekels le kilo !!! A titre indicatif, ça fait 1 euro le kilo, en France, je les avais à 4 euros le kilo !

    Il termine en me disant de lui apporter un pot qu'il m'achète.  

    Reste le problème de la verrerie.

    Je fais un halte chez mon épicier.

    Je fais chez lui le gros de mes courses et il me connait bien. Je lui dis ma joie d'avoir des perspectives pour mes confitures… mais où trouver de la verrerie ?

    "Kanion kvoutsot, le mardi", me dit-il. C'est un centre commercial que tout le monde connaît ici.

    Il ajoute: "Apporte moi ta confiture, je veux goûter…"

    Voilà ce que je peux dire ce soir, voilà où j'en suis.

    Je suis sidéré. Sidéré par la réactivité des gens, ici. Encore bien au-delà que ce que j'écrivais le 27 janvier, soit il y a une semaine, je ressens des choses étonnantes.

    Mon sentiment, c'est qu'ici, dès lors qu'on montre une aptitude, les soutiens affluent. Il y a un respect, du "kavod" pour ce qui est bien fait, et l'envie de l'encourager.

    Il y a une culture de l'entreprise, aux sens large. Les gens, pratiquement tous les gens, de tous les milieux, feront ce qu'ils peuvent pour encourager celui qui apporte quelque chose.

    Et je n'ai même pas évoqué l'aide de mme Y., du ministère de l'intégration, qui va me faire bénéficier d'une dérogation afin que je bénéficie du pilotage d'une pépinière d'entreprise à titre gracieux. Ni de mon camarade de l'oulpan qui me propose de me véhiculer pour aller présenter mes produits à droite et à gauche.

    Je crois, ce soir, que de belles opportunités se présentent à moi. Il me reste à les concrétiser.

    Mais, quelque soit l'avenir, je me demande si ce n'est pas cette mentalité qui est une des clefs du "miracle israélien".

    Et je suis très tenté de répondre par l'affirmative…

     

    (à suivre…)

     

     

     

     

     

     

     

     


    [1] "Mora" = professeur –euse, en hébreu.

    [2] "Russes" parmi les "russes" de l'oulpan, il y a des russes russes et des juifs russes. Les premiers sont maris ou épouses des seconds. En tous les cas, tous sont russophones…

    [3] "Français": nous sommes 4 dans la classe; entendre "israéliens francophones". 


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  • Commentaires

    1
    kravi
    Lundi 6 Février 2012 à 18:55
    kravi

    Content de te voir content.

    Oui, les mentalités diffèrent : bon sujet pour antidoxe ?

    2
    Rotil Profil de Rotil
    Lundi 6 Février 2012 à 18:59

    Pas tout de suite, mais peut-être dans quelque temps... 

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