• Sur le "documentaire" d'Arte du 18 novembre 2009...

    Nous le savions, peut-être pas tous, mais un certain nombre d'entre nous.

    Un juif, victime de persécution, on aime bien – mais pas en trop grand nombre, excès en tout est un défaut, comme disait mon papa – mais un israélien qui se bat pour son pays, c'est douteux.

    Le doute est levé quand l'israélien gagne. A ce moment-là, il devient intolérable.

    C'est le message qu'Arte nous a servi hier soir 18 novembre avec son documentaire sur la guerre des six jours.

    Et de façon très habile.

    Franchement, si je n'avais pas vécu cette période, si je n'étais pas personnellement concerné par ce qui se passe dans un de mes deux pays – oui, j'avoue ! – si j'étais un "français pur race" de 30 ans sans culture historique, j'aurais compris en regardant cette émission qu'Israël est un pays franchement immonde.

    Mais regardons d'un peu plus près cette émission.

    Dans la première partie, Gamal Abdel Nasser nous est dépeint comme plutôt gentil, un joueur d'échec qui ne s'occupe pas des affaires militaires. Cette image perdurera tout au long du film.

    Il voulait juste fédérer la nation arabe. C'était un héros de la nation arabe. Tous les peuples arabes l'aimaient comme un père, celui qui allait leur rendre leur fierté à tous.

    Ensuite, on nous présente Levy Eshkol, le premier ministre d'Israël. Il est de gauche et sympa, il ne veut pas la guerre.

    A un moment où les israéliens flippent comme des malades en voyant la haine que charrient les manifestations des foules arabes, les caricatures de juifs véhiculées par la presse écrite et télévisuelle, le pauvre Eshkol se prend à bégayer pendant un discours au pays, et apparaît comme peu sûr de lui.

    Le documentaire ne comprend pas comment un simple bégaiement a pu ainsi inquiéter la population d'Israël. C'est vrai que les israéliens sont assez nuls. En France, on prétend que Madame Royal a perdu l'élection de 2007 a cause d'un mot de travers, bravitude, mais en Israël et sous une énorme pression, il ne faut pas s'inquiéter quand le chef du gouvernement semble avoir lui-même peur de ce qui se passe.

    Nasser positionne ses armées dans le Sinaï, après avoir prié les casques bleus de l'O.N.U. de dégager, puis, pour augmenter la pression, ferme le détroit de Tiran à la navigation israélienne.

    Tout cela au fond, nous explique-t-on, n'est pas bien grave. Il n'y avait pas là matière à faire la guerre.

    Pauvre Nasser, pauvre joueur d'échec qui se fie à son chef d'Etat-major qui déclare que l'armée égyptienne est fin prête et annonce au général des casques bleus "La prochaine fois que nous nous verrons, ce sera pour prendre un verre à Tel-Aviv".

    Et ces méchants généraux israéliens –pardon, sionistes- qui savent, eux, que l'armée d'Israël est plus forte et ont l'outrecuidance de ne pas le crier sur les toits. Ca, c'est vraiment vicieux de chez vicieux.

    S'ils avaient été honnêtes, ils seraient allés au Caire, auraient eu la courtoisie de solliciter une entrevue auprès du Raïs, auquel ils auraient montré leur plan machiavélique pour détruire en quelques heures l'aviation de l'Egypte.

    Comme ce sont des gens sans foi ni loi, ils sont restés coi. Et savez-vous au nom de quoi ils sont restés coi ?

    Au nom du secret militaire. Quelle mauvaise foi, n'est-ce pas ?

    En France, nous avons eu quelqu'un qui, en 1870, déclara triomphalement "il ne manque pas à nos soldats un seul bouton de guêtre !"

    Les allemands eurent la méchanceté de ne pas nous dire que leur armée était plus prête que la nôtre.

    Différence cependant de taille, la dépêche d'Ems qui est à l'origine de la guerre de 1870 est le fait des allemands – qui voulaient la guerre et l'ont gagnée – alors que la guerre des six jours est provoquée par les actions du dirigeant de l'Egypte, qui la perd.

    A un moment, court flashback sur la guerre du Sinaï, celle de 1956. Pas un mot sur ses origines. On comprend à regarder l'émission pourquoi la Grande-Bretagne et la France se sont lancées dans cette opération, mais nulle part le téléspectateur ne voit pourquoi Israël a envahi le Sinaï. Comme il n'est rien dit des infiltrations régulières de fédayins venant du Sinaï pour causer du tort aux biens ou aux personnes en Israël, on ne peut que penser que la guerre du Sinaï de 1956, c'était juste pour embêter les égyptiens.

    Puis, vient le coup du "coup d'état des généraux". Que Lévy Eshkol ait subi des pressions, de la rue israélienne et de députés de la Knesset, ainsi que des généraux, cela évident. Mais ces pressions étaient parfaitement normales et résultaient des coups de force de Nasser et de l'amiral Amer.  

    Mais parler de coup d'état, ça, c'est amusant.

    Bien évidemment, le reportage nous dit deux ou trois petites choses qui vont à l'encontre d'un parti pris pro-arabe trop évident. Ainsi, tout à la fin, a-t-on l'opinion d'un journaliste syrien qui déclare (de mémoire, donc ce n'est pas une citation mot-à-mot) que dans n'importe quel Etat (normal), une telle défaite aurait conduit à la chute du gouvernement, mais que, dans les pays arabes, le seul but d'un gouvernement est de rester en place.

    D'autres choses sont choquantes, c'est le casting : on prend majoritairement des gens qui sont, en Israël, très critiques à l'endroit de la politique de leur pays, de l'autre côté, des gens qui présentent bien et arrondissent les angles.

    Je ne crois pas à une armée sans faute. Je pense que dans une situation de guerre, les repères que nous avons dans le civil n'ont plus cours.

    Mais ce reportage m'a confirmé dans une idée, une perception des choses :

    Arte, c'est une chaine qui adore les juifs persécutés, nous le voyons à travers sa programmation. La Liste de Schindler, et avant-hier, Le Commissariat. Entre les deux, tant d'autres films, qui gavent certains…

    Mais, dès lors que des juifs israéliens (de méchants sionistes, des sionistes méchants) usent de leur armée et, de surcroit, sont victorieux, alors çà, ça ne passe plus.

    Jérusalem devient alors dans le reportage une ville arabe (Ah bon ?! quand ?!), et on n'évoque même pas le siège de la Jérusalem juive, en 1948.

    Bon, ce soir, j'en ai un peux assez ! Tout cela me fatigue, j'éditerai peut-être cet article demain en fonction de vos réactions.

    Question : Israël a-t-elle le droit de vivre ?


    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    1
    Esaïe
    Jeudi 19 Novembre 2009 à 21:54
    Bonjour Iratika,

    pour résumer, dans le reportage je n'est enttendu que ce qui m'interesser, cet a dire, la victoire extraordinaire des Iraéliens sur leurs ennemis jurés, on ne pouvait pas s'attendre a autre chose avec ARTE,
    et pour finir, je dirai, il est préférable d'être un juif criminel qu'un juif mort.

    Shalom vé laila tov.
    2
    Cyril2
    Vendredi 20 Novembre 2009 à 01:22
    Malheureusement, il est difficile de lutter contre les archétypes. Le juif, dans la représentation mentale qu'on s'en fait, c'est celui qui est la victime. Le fait qu'un juif lève la main, ne serait ce que pour se défendre, cela ne concorde plus avec  l'image qu'on s'en fait. Or, le psychisme, par soucis de confort et de facilité se nourrit d'images toutes faites, de préjugés. Comme tu l'as bien écrit, on aime le juif quand il est à sa place, c'est à dire quand on l'écrase et qu'il s'écrase. Fichtre, il faut bien des boucs émissaires pour divertir les masses! Si on n'a plus son petit youpin sur qui se défouler, où va le monde? Et si un jour il arrivait malheur une fois de plus au peuple d'Israel, gageons que pendant que la moitié de la planète se réjouira, l'autre moitié se désolera. Et après une minute de silence et de contrition le monde continuera à tourner comme avant.
    3
    Olivier2
    Samedi 6 Mars 2010 à 21:36
    Bonjour, j'ai vu ce documentaire, vos remarques sont globalement justes (bien que je persiste à considérer Arte comme une chaine relativement équilibrée sur le sujet, tout comme, en radio, France-Culture - finalement les chaines un peu "intello" se révèlent moins idéolgiques ou moins marquées par les présupposés que les chaines plus "grand public"). Cela étant, pour ce reportage, il pouvait malheureusement s'appuyer sur des travaux d'historiens, politiciens, journalistes ou même militaires israéliens pratiquant une auto-critique souvent complaisante, comme si la transformation de faits historiques en "mythes" à déboulonner était le but suprême de toute analyse. Exercice très pratiqué en Israël comme dans les démocraties européennes d'ailleurs, mais celles-ci ne sont pas face aux mêmes enjeux existentiels... Exercice en revanche peu pratiqué en pays arabes, sinon pour de timides critiques internes sur la corruption des régimes en place, ce qui est l'inverse d'une critique subsersive (s'attaquant aux "fondamentaux" de la nation) et s'apparente plutôt à une surenchère dans la vertu ou le plaidoyer pro-domo. D'où ce sentiment bizarre, lors des différentes interviews, d'entendre des israéliens soit pro-israéliens, soit nuancés, soit carrément anti-israéliens et des arabes tous pro-arabes. C'est d'autant plus gênant qu'on pourrait en tirer la conclusion non pas qu'il y a face à face 2 cultures politiques radicalement différentes mais que les israéliens ont objectivement tort puisque certains d'entre eux le reconnaissent : autrement dit, comment un représentant du "colonisé" ou de "l'agressé" pourrait-il être contre lui-même ? Alors qu'il est somme toute normal que quelques représentants honnêtes du "colonisateur" ou de "l'agresseur" reconnaissent leurs crimes..
    4
    Rotil Profil de Rotil
    Dimanche 7 Mars 2010 à 23:34

    @ Olivier2,

    Merci pour vos commentaires que j'ai mis en ligne. Je répondrai d'abord à celui-ci.

    Il y a effectivement 2 cultures politiques radicalement différentes, mais plus que cela encore, 2 modes de pensées en opposition.

    L'Islam est à l'opposé du judaïsme, et je pense que c'est bien plus là que se situe le problême que dans une opposition entre "colonisé/agressé" et "colonisateur/agresseur".

    Toutes ces notions devant à mon avis aussi  être découplées pour devenir compréhensible.

    La question politique et territoriale aurait pu être réglée dès 1947, et même avant, mais les anglais s'étaient invités.

    Elle aurait pu être réglée ensuite. Souvenez-vous qu'après 1967, Israel demandait "la paix contre les territoires".

    Jamais les palestiniens ni, avec eux, les états arabes n'en ont voulu, ni desterritoires, ni de la paix.

    Et je crains que ce ne soit pas fini.

    D'un côté, Israel très fort techniquement, de l'autre une masse de pays et de populations, plus le pétrole et l'influence internationale.

    D'un côté Israel, pays démocratique, de l'autre des caïdats qui oprime et endoctrine leurs peuples.

    D'un côté un peuple qui ne reconnait comme autorité ultime qu'une entité abstraite et sans délégation terrestre, de l'autre des peuples totalement ignares et sans la moindre démocratie.

    Et puis, si vous le voulez bien, je vous parlerai prochainement d'une idée qui me trotte par la tête depuis déjà quelque temps

    Bien à vous.

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :